Etat des lieux complétant notre rapport d'octobre 2015, disponible à l'adresse suivante :
https://www.nepatrek.com/solidarite-langtang/le-langtang-6-mois-apres/
INTRODUCTION :
Ce rapport fait suite à celui réalisé en octobre 2015 par l’agence de trekking Nepatrek, en collaboration avec l’association Nepatrek Solidarité France. Premier rapport global effectué sur la région du Langtang (Tamang Heritage et Gosaikunda) au niveau international, l’état des lieux d’octobre ne présentait pas la vallée proprement dite de Langtang en raison de l'état du sentier qui n’était pas encore sécurisé et officiellement ouvert lors de notre passage.
En cette fin décembre 2015, nous sommes heureux de vous annoncer que l’état des lieux de cette zone est maintenant disponible et que plusieurs mises à jour ont été réalisées au précédent rapport, signe que la situation évolue dans la région.
C’est donc au cours d’un second trek solidaire dans la région que Nepatrek et ses collègues de Nepatrek Solidarité France sont allés sonder la zone, questionner ses habitants et rendre compte de la situation et du potentiel touristique du Langtang. Un point a donc été fait sur la situation sanitaire, les projets en cours, le nombre de touristes présents, les conditions de sécurité et le taux de destruction des villages.
Nepatrek étant la première agence à avoir lancé le concept de trek solidaire, son équipe ne savait pas précisément à quoi allaient aboutir ses treks et quel budget elle allait en tirer pour financer ses projets d’aide pour la région. L’heure est aujourd’hui aux comptes, mais le bilan demeure très positif et l’équipe tient à remercier tous les participants et annonce qu’elle reconduit l’expérience pour la saison prochaine, sur le même principe participatif, responsable et équitable.
Rappelons que ces treks ont été lancés pour maintenir une présence touristique (de manière à maintenir une activité), apporter un soutien moral, mais aussi remettre en route l’économique locale dans de nombreux villages.
Ce second trek s’est déroulé du 9 novembre au 28 novembre 2015, soit vingt jours et quelques 160 km de trek sur tous les chemins majeurs de la région et dans tous les villages.
MISE A JOUR SECTEUR TAMANG HERITAGE
INTRODUCTION :
La situation n’a guère évolué mais nous avons tout de même pu constater quelques changements notables.
De manière générale, nous avons notamment pu voir que la vie a repris son cours « normal » et que plusieurs habitants ont même ré-emménagé dans leurs maisons. Phénomène compréhensible, de nombreuses familles préféraient jusqu’à aujourd’hui dormir dans des abris plutôt que dans leur maison, qui parfois pouvait être en état impeccable, de peur qu’une réplique plus grosse que les autres ne finisse de détruire ce qui ne l’avait pas encore été. L’hiver arrivant, beaucoup ont fait le choix de reprendre possession de leur domicile, s’investir dans les réparations et reprendre leur vie « normale » faite d’agriculture et tourisme.
Techniquement, la région est aujourd’hui prête à accueillir les trekkeurs en grand nombre. Lors de notre premier état des lieux, nous étions le seul groupe à parcourir le trek. Aujourd’hui, la situation s’améliore mais le flux de trekkeurs reste très pauvre. En sept jours passés sur le trek, nous avons croisé en tout et pour tout onze touristes, ce qui est deux fois plus faible qu’en temps normal.
Compte tenu du peu de changements notables, nous ne citerons que les villages où la situation a changé de façon significative et les informations vraiment utiles d’être données. Considérons que les villages qui ne sont pas mentionnés sont exactement dans la même situation que 2 mois auparavant.
GATLANG (2240m) : Nous avons été agréablement surpris de voir toutes les guest-houses du village en cours de reconstruction ou de réparation, trois étant déjà totalement opérationnelles. Nous estimons à deux mois (soit jusqu’à fin février) le temps nécessaire pour retrouver 100 % des guest-houses opérationnelles. Seuls les logements chez l’habitant qui faisaient l’originalité du village sont encore inexistants (car complètement détruits) et nous ignorons sous quel délais ils seront réhabilités.
Dans ce même village, la vie a repris ses droits, plusieurs ruines ont été nettoyées, les sentiers remis en état à l’intérieur du village et quelques maisons commencent à se reconstruire à l’identique. Mais sans surprise, on déplore que la majeure partie des villageois vit encore dans des abris. Cependant, une réelle motivation à reconstruire le village tel qu’il était auparavant semble se mettre en place ; nous en sommes très heureux car Gatlang fait partie de ces rares villages traditionnels ayant une culture forte et un réel intérêt à la préserver.
Aujourd’hui, contrairement à il y a un mois, Nous n’avons plus le sentiment de marcher dans un village fantôme ; les gens sillonnent dans les allées, les haricots sèchent devant les maisons, les scies s’activent à couper le bois et les enfants chahutent comme auparavant. Gatlang fait partie de ces quelques villages encourageants. Nous sommes rassurés à ce niveau et constatons que si la reconstruction prendra beaucoup de temps, elle a toutefois démarré, lentement et, espérons-le, suscitera un élan général.
Nous avons été très touchés par une initiative de quatre Espagnols ayant choisi de reconstruire deux maisons pour des familles démunies et personnes seules en âge avancé. Ces jeunes gens sont venus par leurs propres moyens et leurs huit bras et prendront tout le temps nécessaire pour permettre à ces deux familles d’être relogées au sec et au chaud pendant l’hiver. Une magnifique œuvre.
TATOPANI (2600m) : Notre avis est très partagé concernant ce village charmant. Nous l’avons dit dans le dernier rapport, Tatopani ne compte, au bas mot, aucune maison détruite du fait qu’elles sont toutes faites de bois (donc légères et souples). Les nombreuses guest-houses du village sont donc en pleine capacité d’accueillir les trekkeurs, ce qui est formidable, mais une véritable catastrophe pourrait bien remettre en question l’avenir du village et peut-être même du trek du Tamang Heritage tout entier.
Ce qui nous préoccupe sérieusement, c’est la disparition de la source d’eau chaude. Lors de notre dernier passage en octobre, la source existait mais avait vu son débit réduire des 2/3. Les populations locales se montraient optimistes puisque, pendant un temps, l’eau avait disparu, puis était revenue fébrilement lors de notre visite. Aujourd’hui, les bains d’eau chaude ne sont plus possibles. Nous sommes à peine à la moitié de la saison sèche et l’eau a disparu. C’est une vraie problématique. Tatopani jouissait d’une renommée nationale, voire internationale de par les bienfaits de son eau chaude, tout le village s’est construit autour de cet attrait naturel. Aujourd’hui les guest-houses ferment les unes après les autres avec l’absence de touristes et d’eau. En observant la source, il n’est pas compliqué de comprendre que l’eau n’a pas disparu mais que le tremblement d’avril 2015 a certainement déplacé la nappe. Creuser un trou au niveau de la source et y placer une conduite forcée pourraient résoudre le problème, si la nappe demeure toujours accessible.
Ce qui nous inquiète, bien au-delà du fait que le trek du Tamang Heritage reste tout aussi intéressant culturellement et que les paysages demeurent exceptionnels, c’est que certains de ses nombreux attraits majeurs disparaissent les uns après les autres, conséquence directe mais à retardement du tremblement de terre. Ce trek court pourrait bien perdre du terrain face à ses concurrents comme le Balcon des Annapurna (où il y a aussi un village appelé Tatopani, ce qui signifie « eau chaude » en Népali) si des décisions ne sont pas prises rapidement. Affaire à suivre...
TIMURE (1760m) : Ce village a lui aussi beaucoup changé depuis notre dernier passage, non pas en raison de l’après-séisme mais de la crise politico-énergétique* majeure qui frappe le pays en ce moment. Ce village dévasté par les tremblements de terre n’a absolument pas changé depuis notre dernier passage en terme de reconstruction mais nous constatons que de nombreux Népalais, majoritairement de Kathmandu, Dhunche et Syabru Besi, séjournent ici pour commercer avec le Tibet tout proche. La crise énergétique du Népal suscite des vocations et l’envie de passer la frontière pour s’approvisionner et alimenter le marché noir devient une manne financière profitable. Timure, ce village si authentique, est donc devenu provisoirement un village de halte routière, à regret car cette présence d’individus assoiffés d’argent dénote vraiment par rapport au reste de la région au caractère authentique. Mais rappelons que nous sommes dans un contexte exceptionnel de crise nationale ; cette situation n’existe pas en temps normal et le village demeure très intéressant à découvrir et est méconnu. Timure reste aujourd’hui un lieu d’étape quasi obligatoire pour les trekkeurs en raison de la destruction du pont de Ling-Ling qui reliait Thuman à Briddhim.
* Plus d’informations dans le chapitre "Un contexte politico-économique difficile"
LING – LING (1740m) : Le pont suspendu permettant de traverser la rivière et reliant Thuman à Briddhim n’est malheureusement toujours pas réparé, nous ignorons quand il sera réhabilité. Les informations obtenues sur ce projet sont contradictoires et la crise énergétique n’arrange pas la situation.
En attendant, ce trek étant plutôt familial, il est préférable de faire étape à Timure, puis rejoindre Briddhim le jour d'après.
Pour les bons marcheurs, il est toutefois possible de faire Thuman – Briddhim dans la journée (environ 7 heures) sans passer par Timure, mais les dénivelés négatif, puis positif peuvent être conséquents pour certains (-850m / + 750m en cumulé) et il n’y a pour l’instant aucun établissement en mesure de vous accueillir pour le déjeuner (éventuellement à Ling-Ling de façon sommaire).
Accès Briddhim – Syabru Besi dangereux :
Il existe deux chemins permettant de relier Briddhim à Syabru Besi :
1 – Le sentier haut, que nous recommandons vivement, cheminant dans une agréable forêt de rhododendrons en balcon avec vues sur tout le trek du Tamang Heritage. Ce sentier vous conduit à Khanjim en environ 1h30 de marche ou vous pourrez prendre un thé, puis descend rapidement jusqu’à Syabru Besi en 1h30 également. C’est de loin la meilleure façon de regagner la vallée de façon sûre et agréable.
2 – Le sentier bas qui consiste à descendre progressivement jusqu’à Syabru Besi, également dans la forêt. Celui-ci, nous vous le déconseillons vivement car le terrain ne s’est pas encore complètement stabilisé au niveau de Wangal (en fond de vallée) et un chantier de construction d’une piste montant à Khanjim est en cours et provoque régulièrement des éboulements. Rappelons qu’une chute de pierres a tué une personne lors de notre premier passage.
L'itinéraire que nous vous conseillons pour ce trek :
- Jour 1 : Syabru Besi - Gatlang (5h de marche - étape d'une journée supplémentaire possible pour visiter le Parvati Kunda et la fromagerie).
- Jour 2 : Gatlang - Tatopani (6h de marche).
- Jour 3 : Tatopani - Nagthali - Thuman (5h de marche - étape d'une journée supplémentaire possible à Nagthali pour faire l'ascension du Taruche).
- Jour 4 : Thuman – Timure (4 heures de marche), puis visite de Rasuwagadhi (la frontière Tibétaine) l’après-midi (2h30 de marche l’aller-retour).
- Jour 5 : Timure – Briddhim (4 heures de marche).
- Jour 6 : Briddhim - Khanjim - Syabru Besi (3h30 de marche).
Note : A partir de Khanjim, il est possible d'enchaîner sur le trek du Langtang via Sherpagaon.
CONCLUSION :
Cette région, qui figure très largement parmi les plus beaux treks courts du Népal de par sa diversité culturelle, naturelle et paysagère, se trouve aujourd’hui face à un grand défi. Le tremblement de terre a fait beaucoup de mal au patrimoine culturel de ce trek, mais a aussi fait disparaitre un de ses principaux attraits naturel : la source d’eau chaude de Tatopani. De plus, la région a été choisie par l’Etat Népalais pour devenir le plus gros fournisseur d’électricité du pays. Les nombreux investissements Chinois font apparaitre des centrales hydroélectriques au fond de la vallée de la Bhote Koshi River (Chilime, Timure, …) et de la Sanjen Khola (Lanjumna Kharka) et plusieurs pistes desserviront bientôt les villages de Tatopani, Briddhim et Khanjim. Jusque-là extrêmement bien gérés, ces projets sont quasi-invisibles aux yeux des touristes et les sentiers de trek évitent ces zones ; il n’y a donc pas de quoi s’inquiéter à moyen terme, d’autant que le Tamang Heritage mérite vraiment d’être découvert. Ce qui nous inquiète est la vitesse à laquelle la région se métamorphose et quelles mesures vont être prises pour à la fois préserver le tourisme et profiter des intérêts naturels de la région pour développer tout un pays. Cette zone se trouve hors du Parc National du Langtang, elle est donc beaucoup moins exposée aux règles strictes d’environnement, malgré que sa biodiversité soit extrêmement riche. Les touristes semblent vouloir commencer à revenir dans la région et certains villages en train de se reconstruire pourraient, on l’espère, montrer l’exemple aux autres et favoriser une dynamique.
MISE A JOUR SECTEUR GOSAIKUNDA
Compte tenu que la zone a subi peu de dommages, la situation a à fortiori peu évolué.
En revanche, le flux de trekkeurs a progressé de façon significative. Le village de Thulo Syabru à lui seul comptait une dizaine de trekkeurs lors de notre passage, ce qui est très encourageant pour l’avenir, signe que les informations sur la région sont passées et que les agences et touristes semblent vouloir rester fidèles à la région.
Le phénomène d’éclatement d’itinéraire reste toutefois d’actualité, notamment pour les groupes venant pour la première fois dans la région. Certains d’entre eux préfèrent commencer leur trek à Dhunche, d’autres à Barkhu, et d’autres évitent le secteur Helambu qui reste aujourd’hui en état critique. Seuls les habitués de la région reviennent volontiers dans les zones sinistrées pour apporter un soutien à des gens avec qui ils ont pu établir des liens forts, ou plus simplement les curieux qui reviennent voir le trek qu’ils ont parcouru dans le passé.
Ce phénomène d’éclatement peut toutefois apporter de bonnes choses à la région en répartissant le flux de touristes et par conséquent les recettes économiques. Certains sentiers seront donc moins congestionnés et surtout nous sommes peut-être à l’aube de nouveaux treks et variantes ouvrant des opportunités financières à des gens qui ne vivaient presque que de l’agriculture.
Il reste encore énormément de travail à Thulo Syabru. Ce village a été anéanti par le séisme et beaucoup d’habitants ne savent toujours pas s’ils vont reconstruire leurs maisons et où ils vont les reconstruire. Le contexte de crise énergétique que connait le Népal a mis à l’arrêt le chantier de construction de la piste Sano Barkhu – Brabal – Thulo Syabru, ce qui ralenti extrêmement la reconstruction du village et alourdit fortement les frais de ceux qui reconstruisent. Toutefois, plusieurs villageois ont pris les devants et ont d’ores-et-déjà amorcé la réparation ou la reconstruction de leurs maisons avant l’hiver. De nouveaux concepts circulent, notamment celui de cottage écologique avec jardin bio qui semble être un objectif commun à plusieurs personnes. Ce village qui a beaucoup souffert du séisme semble aujourd’hui vouloir profiter de la situation pour faire table rase de tous les concepts d’hier pour voir vers le futur en s’adaptant à l’évolution du marché du tourisme et au respect de l’environnement. Nous sommes très heureux de découvrir cette approche responsable et espérons qu’elle se développera au-delà de ce seul village. Cette situation nous rassure pour l’avenir car avec de telles idées et une telle motivation, nous ne voyons pas comment le tourisme ne reviendrait pas dans ce village qui est le carrefour de deux treks majeurs. Accordons-leur deux ans et nous pourrions voir de grandes choses se développer à Thulo Syabru, soyons-en sûrs.
Enfin, nous l’évoquions plus haut, il existe aussi le projet de route Sano Bharku – Brabal – Thulo Syabru* qui pourrait bien, lui aussi, revoir toute la carte touristique de la région et faire de Thulo Syabru un point de départ de plusieurs treks majeurs dont le Langtang et Gosaikunda, au grand dam de villages comme Syabru Besi ou Dhunche. Il est donc intéressant d’observer la manière dont l’Etat et les élus locaux géreront ce développement routier et la façon dont ils accueilleront le tourisme qui est un des moteurs de l’économie locale.
* Plus d’informations dans la chapitre "Une région en mutation".
L'itinéraire que nous vous conseillons :
L'Helambu étant en grande partie détruit et de nombreuses pistes croisant les sentiers, nous préférons pour l'instant éviter la zone. Il existe de nombreuses possibilités dues à l'éclatement des itinéraires, mais voici celle que nous jugeons la plus intéressante :
Jour 1 : Syabru Besi - Thulo Syabru (3h de marche).
Jour 2 : Thulo Syabru - Sing Gompa (5h de marche)
Jour 3 : Sing Gompa - Laurebina (4h de marche)
Jour 4 : Laurebina - Gosaikunda (4h de marche)
Jour 5 : Gosaikunda - Mukharka (6h de marche - être accompagné d'un guide de la région est obligatoire tant la zone est sauvage. Mais il s'agit de la Red Panda Area, une zone très protégée où on peut avoir la chance d'observer des pandas roux).
Jour 6 : Mukharka - Syabru Besi (4h de marche)
Des variantes sont possibles, de nouveaux sentiers également. Nepatrek est en train d'explorer la zone pour proposer d'autres itinéraires plus aventureux avec des paysages vertigineux. A suivre...
SECTEUR VALLE DE LANGTANG
INTRODUCTION :
Que dire sur cette vallée…
Nous connaissons tous le drame qui s’est produit au Langtang, avons vu de nombreuses images, de nombreux reportages et témoignages, mais le constater de ses propres yeux est une épreuve émotionnelle terrible et la réalité est bien plus choquante que les images.
Il n’y a pas besoin de dix pages pour résumer la situation actuelle de la zone tant les dégâts sont généraux et démesurés. Toutefois, les nombreux témoignages que nous avons recueillis permettent de faire un point précis sur chaque hameau de la vallée et d’avoir un regard vers l’avenir. Grâce à ces informations collectées, nous tenterons de donner des pistes sur ce que pourrait être la région demain. Car si la situation est dramatique et le défi de reconstruction titanesque, les choses bougent, les projets se mettent en place et le tourisme voudrait volontiers revenir dans cette vallée magnifique.
C’est au cours d’un trek de six jours que notre équipe a pu recueillir des témoignages, des informations et des impressions sur ce qu’est devenue la région et ce qu’elle pourrait devenir dans le futur. L’équipe a fait le choix, pour cette fois-ci, de réaliser l’état des lieux en complète autonomie (trek sous tente) par respect pour les populations locales de manière à ne pas s’imposer à elles, mais aussi nous permettre plus de liberté dans notre démarche. Ce n’est habituellement pas notre façon d’aborder un trek, nous préférons en effet organiser des treks en guest-houses ou chez l’habitant, quand cela est possible, pour assurer une bonne répartition des recettes touristiques et un bon développement économique régional ; le trek sous tente n’étant absolument pas profitable au développement local. Ayant à faire à une population meurtrie, en pleine reconstruction, matérielle comme psychologique, nous ne voulions en aucun cas imposer à ces gens la contrainte d’un hébergement dans leurs maisons et les « forcer » à accueillir des touristes en visite dans la région.
Pour autant, étant maintenant revenus du Langtang avec de nombreux contacts, nous pourrions désormais favoriser les treks à vocation responsable, équitable et solidaire par le biais de logements chez l’habitant avec des gens en ayant manifesté la volonté ou en guest-houses pour assurer la pérennité de la région.
SHERPAGAON (2560m) : Le village compte 21 maisons, 64 habitants dont un est décédé avec le séisme. Sur les six guest-houses, quatre sont en état correct dont deux en excellent état. Les deux autres demeurent très endommagées et doivent être réparées. Le sentier d’accès au village est très bon et agréable et chemine par Khanjim. Le sentier du bas de vallée et celui par Thulo Syabru sont aujourd’hui fermés et encore beaucoup trop dangereux. Sherpagaon est donc aujourd’hui une étape obligatoire pour pénétrer dans la vallée de Langtang. Des discussions sont en cours pour réhabiliter les autres sentiers, mais la remise en état n’est pas prévue avant un bon moment. D’un point de vue touristique, le village est en bonne capacité d’accueillir les trekkeurs et sera réparé à 100 % dans quelques mois.
Le jour de notre visite, 17 novembre 2015 à 19h, la terre a tremblé. Contrairement à Kathmandu où les gens rient facilement, nous ressentons ici la peur omniprésente des habitants qui se précipitent dehors à chaque secousse. Leur regard au moment de la secousse fait froid dans le dos. C’est une sensation étrange et effrayante de se dire que nous montons dans la vallée la plus sinistrée du séisme et la plus exposée aux éboulements et que dès le premier soir la terre se met à trembler.
RIMCHE (2400m) : Le hameau, sur les terres du Parc National, compte deux guest-houses dont une est aujourd’hui en parfait état suite à sa réparation. Les touristes peuvent donc séjourner dans ce village. La seconde guest-house pourrait être réparée pour ré-ouvrir la saison prochaine (mars). Aucune victime à déplorer.
Le chemin Thulo Syabru – Païro – Bamboo – Rimche, de l’autre côté de la rivière n’existe plus et tous les villages se trouvant sur son tracé sont anéantis. La réhabilitation prendra beaucoup de temps mais devrait se faire comme nous l’évoquions plus haut.
LAMA HOTEL (2450m) : Egalement construit sur les terres du Parc National, ce village de sept guest-houses est devenu un village fantôme. Ses habitants ont déserté à Kathmandu et ne reviendront que pour la reconstruction. La plupart des maisons est encore debout mais toutes ont fortement été malmenées par le tremblement de terre. Depuis, elles sont laissées à l’abandon, les singes, ânes et autres rongeurs s’occupant de délabrer encore un peu plus ces maisons déjà bien fragilisées. Traverser ce village donne un premier aperçu de ce qu’est devenue la vallée, désertée subitement, abandonnée et triste. De sérieux travaux de réparation doivent être réalisés. Certaines personnes commencent d’ailleurs à nettoyer les décombres et envisagent une reconstruction imminente. Aucun décès à déplorer. Vous l’aurez compris, il n’est pas envisageable de séjourner à Lama Hotel avant au moins plusieurs mois.
Un Parc National dépassé par les événements :
Après avoir discuté avec la plupart des gérants de guest-houses, nous avons appris que le Parc National n’interviendra pas dans la reconstruction des établissements sinistrés (c’est-à-dire tous) mais uniquement dans la construction de nouveaux projets sur des terrains vierges. Il appartient donc aux gérants d’assurer à leurs frais la reconstruction ou la réparation des établissements dont ils ont la gérance. Ces gérants sont sélectionnés pour en moyenne une période de 2 ans (renouvelable sous conditions) et un loyer annuel d’environ 800 à 1000 € doit être versé au Parc. Depuis les événements, bien entendu, personne ne verse de loyer compte tenu de la situation catastrophique des lieux. Certains disent qu’en compensation des travaux effectués avec de l’argent personnel, le Parc pourrait accorder la gratuité du bail pour plusieurs années et prolonger ce dernier pour permettre un retour sur investissement adéquat à ces gérants qui investissent avec leurs fond privés. Ce ne sont que des rumeurs que nous rapportons, aucune confirmation n’a été apportée par le Parc mais nous espérons vivement que ce sera le cas.
RIVER SIDE (2600m) : Ce hameau de 2 guest-houses appartenant au Parc National se trouve aujourd’hui dans un état chaotique. Les débris (habits, charpente, matériel de cuisine, pierres…) gisent sur le sol, étalés sur plus de 300m², le long de la rivière. Il ne reste plus rien, tout est à refaire. S’il y en avait déjà tout le long du chemin, à partir de ce point tout le sentier traverse d’innombrables éboulements encore très menaçants et plus impressionnants les uns que les autres. S’aventurer seul dans cette vallée s’avère être de la folie tant le terrain est exposé. Aucune victime à déplorer.
CHUNAMA (2790m) : Le seul établissement (propriété du Parc) de cette clairière semble, en apparence, bien épargné. Il a cependant bien bougé au niveau du bâtiment abritant les chambres. Les murs sont bombés mais la réparation ne devrait pas être très compliquée. Nous n’avons pas rencontré son gérant mais il est raisonnable de penser que cette guest-house rouvrira ses portes à la saison prochaine. Il s’agît en fait là du dernier établissement en état relativement bon que nous ayons vu entre Rimche et Kyanjin Gompa, tout le reste étant anéanti. Les gérants de cette guest-house sont, comme tous les autres, redescendus à Kathmandu et reviendront après l’hiver. Aucune victime à déplorer.
GHORATABELA (3030m) : Les 2 guest-houses du Parc ont été balayées par les éboulements et le tremblement, ne laissant quasiment plus rien. Le camp de l’armée a plutôt bien résisté mais tous les soldats ont fui dans la vallée.
C’est un sentiment très inconfortable et contradictoire de voir ces scènes de désolation et l’extrême beauté des paysages environnants. Aucune victime à déplorer.
Pour les aventuriers voyageant en autonomie, le camp de l’armée renferme de nombreuses chambres avec sommiers. L’établissement a été laissé ouvert volontairement pour abriter une équipe en train d’entretenir le sentier et de construire des ponts. Une étape peut donc être possible pour les trekkeurs, à condition de monter matelas, duvets et nourriture. Information à prendre toutefois avec des pincettes, nous ne savons pour combien de temps le camp restera ouvert.
Un itinéraire modifié dans quelques mois :
La zone Chunama – Ghoratabela étant une zone très dangereuse exposée aux éboulements, deux ponts sont en train d’être construits afin d’éviter cette zone en passant sur la rive opposée (rive gauche) de la Langtang Khola. Le cheminement consistera donc à traverser la rivière juste au-dessus de Chunama pour passer sur la rive gauche, puis revenir rive droite 300m en-dessous du camp de l’armée de Ghoratabela. Ces travaux sont en cours mais devraient prendre plusieurs mois pour être terminés. En attendant, il faut traverser les pierriers en faisant très attention.
THYANGSYAP (3140m) : Dans ce hameau de quatre maisons, seule une subsiste, même si elle a beaucoup été endommagée et abrite encore son propriétaire, Babu Tamang, qui vit seul ici. Cet homme de 56 ans a installé une grande tente pour accueillir les groupes de passage. Nous avons passé beaucoup de temps à discuter avec lui de ses conditions de vie, de la région et de sa famille. Cet homme très généreux nous a ouvert ses portes le temps de la soirée pour profiter de son poêle à bois et de son hospitalité. Le hameau est lui aussi chaotique. Aucune victime à déplorer.
CHYAMKI (3230m) : A partir de ce point, nous allons de désolation en désolation. Le hameau comptait 3 maisons, elles ont littéralement été soufflées par le séisme. En marchant à cet endroit, on ne sait même pas qu’ici se trouvaient trois maisons. Ce n’est qu’en voyant un pilier à terre (avec de la ferraille à l’intérieur) que nous prenons conscience que nous sommes en train de marcher sur les ruines d’une maison. Ce hameau compte plusieurs décès, apparemment 5. Des drapeaux blancs ont été placés en hommage à ces victimes.
LANGTANG GOMPA (3330m) : Vision d’apocalypse. Les 18 maisons se trouvant à l’entrée du village de Langtang ont elles aussi été soufflées et le désert de roche qu’est devenu le village s’ouvre à nous. Aucun mot ne peut décrire cette scène. Sur le versant nord du Naya Kanga, toute la forêt a elle aussi été soufflée. Tous les arbres sont à terre et dans la même direction. Le souffle provoqué par l’éboulement a balayé tout ce qui se trouvait sur son passage de Mundu à Ghoratabela, soit une zone de 9 km ! Le secteur a été détruit à 100 % par le souffle avec la force d’une tornade au point que rien n’a résisté (maisons, arbres, roche, …) et tout a été effacé de la carte comme si rien n’avait existé auparavant.
LANGTANG VILLAGE (3440m) : La situation est encore pire en réalité que sur toutes les images qu’on peut voir circuler. Sur les 47 maisons du village, une seule reste apparente, sauvée par la corniche rocheuse qui l’a abritée partiellement. Tout le reste n’est que désolation. Comme chacun le sait, il ne reste rien de Langtang. La moitié (partie ouest) du village a été ensevelie par la fracture de la base du Langtang II provoquant un gigantesque éboulement. L’autre partie (partie est) du village a été balayée par le souffle de l’éboulement ne laissant que des piles de débris.
L’éboulement représente une superficie d’environ 1.5 km² et peut faire jusqu’à 40m d’épaisseur par endroit. Ici, absolument rien ne peut laisser penser qu’un village de 50 maisons se trouvait à cet endroit. D’innombrables drapeaux rouges (un par victime retrouvée) sont plantés dans ce désert de roche. La scène est très douloureuse.
On nous a rapporté que 187 Langtangpas sont décédés ici mais on ignore encore exactement combien de personnes (touristes, guides, porteurs…) ont été ensevelies. Certains parlent d’un total de plus de 250 personnes.
Une belle action en cours :
Dans la partie est du village se trouve un camp abritant sept personnes (en majorité Allemandes) qui sont en train de nettoyer tous les décombres et faire un tri de ce qui est récupérable pour dans un deuxième temps commencer à reconstruire le village. Ces individus travaillent pour l’ONG Om Nepal et estiment à trois ans la durée nécessaire pour mener à bien leur projet. Un balai incessant d’hélicoptères apporte des tôles ondulées au nombre de douze par foyer, pour un total de 116 maisons et quelques 500 habitants concernés, entre Thangshyap et Kyanjin Gompa.
A ce jour, encore 80 corps n’ont pas été retrouvés, mais l’initiative d’Om Nepal visant à nettoyer la zone pourrait bien permettre d’en retrouver d’autres.
Régulièrement, des expéditions scientifiques viennent sonder la région et notamment la base du Langtang II et ses glaciers. Avant le tremblement de terre, deux lacs glaciaires se trouvaient à 5000m, ils ont été emportés par l’éboulement. La zone est complètement nouvelle et il est nécessaire d’étudier sa stabilité. On comprend mieux, au fur et à mesure des témoignages, ce qui s’est passé à cet endroit, ne laissant aucune chance à la quasi-totalité des personnes présentes. Outre le tremblement, c’est un éboulement composé de roche, de glace, de neige et d’eau qui s’est abattu sur le village. Plusieurs hélicoptères tournent régulièrement autour de cette zone et lors de notre progression, nous avons croisé un groupe d’une dizaine de scientifiques et une trentaine de porteurs montant jusqu’aux glaciers avoisinant le Yala Peak (5500m) pour une observation.
MUNDU (3580m) : La situation est ici moins grave que dans le reste de la vallée, même si les dégâts restent énormes. Ce village de 16 maisons a vu sa partie haute (partie traditionnelle) épargnée, tandis que le « nouveau » village a subi beaucoup de dommages. Ainsi, la moitié du village est relativement préservée mais aucune guest-house n’est en mesure d’accueillir des touristes. Cela dit, une devrait être réparée dans les prochains mois. Alternative possible, les trekkeurs peuvent séjourner dans la partie haute, chez l’habitant, si bien sûr ces familles l’acceptent et que la taille du groupe est raisonnable. Il est donc préférable de partir avec un guide local Tamang qui pourra vous arranger l’hébergement. Aucune victime à déplorer.
SHINDUM (3620m) : Le village compte 15 maisons, toutes ont été détruites. Aucune victime à déplorer.
KYANJIN GOMPA (3830m) : Sur la trentaine de maisons (la quasi-totalité étant des guest-houses), seule 1 est en excellent état et a même l’électricité solaire. Le reste du village a subi beaucoup de dégâts mais se reconstruit très vite. On sent bien dans ce village que l’aide est arrivée en masse tant il y a de maisons en réparation. Environ 60 personnes sont présentes à Kyanjin Gompa depuis les évènements ; il s’agit d’ailleurs du seul village habité de toute la vallée. Souvent, nous avons entendu dire que les Langtangpas étaient remontés dans la vallée, nous n’en avons vu cependant quasiment aucun. La plupart sont en effet restés à Kathmandu, hébergés dans divers établissements ou dans la famille, et attendent que l’hiver passe pour remonter dans la vallée et reconstruire leurs maisons.
Nous avons profité de notre montée à Kyanjin Gompa pour aller au sommet du Kyanjin Ri faire une prière et une cérémonie en hommage à tous ces disparus de la vallée. C’était également très important pour notre équipe d’encadrement dont tous les membres étaient de la région.
Tous en ont profité pour nous confier qu’ils étaient très apeurés de réaliser ce trek car de nombreuses rumeurs circulent dans la vallée, concernant les esprits de tous ces défunts qui chercheraient à se réapproprier un nouveau corps. En raison de ces rumeurs, de nombreux Tamang ne veulent plus remonter dans le Langtang, ce qui a été un problème pour constituer notre équipe. Il nous a d’ailleurs fallu prendre avec nous un shaman afin d’éloigner les mauvais esprits. Une fois notre puja (cérémonie) terminée, tous étaient rassurés et finalement heureux d’avoir accompli cette expédition à nos côtés et redescendaient fiers de leur parcours et de pouvoir témoigner à leur famille de la situation de ces contrées d’altitude. La plupart d’entre nous ayant perdu des proches lors du séisme, venir ici, même si c’était très dur, était très important pour pouvoir se recueillir et rendre visite à des gens que nous n’avions pas pu voir depuis des mois. Rien que pour ça, nous sommes très fiers d’avoir monté cette caravane.
CONCLUSION : Le Langtang est aujourd’hui une région meurtrie qui doit faire face à de nombreux défis pour se reconstruire et retrouver le flux de touristes qu’il avait auparavant. Vallée finalement peu exploitée (ou du moins proposant une offre peu diversifiée) en matière de tourisme, le Langtang doit, pour se reconstruire, à la fois trouver un compromis entre respect de l’environnement et relogement d’habitants vivant ici depuis des décennies, mais aussi il doit « profiter » de cette remise à zéro pour proposer une offre touristique responsable, diversifiée et en accord avec la demande qui évolue à la fois vers un tourisme de confort mais aussi d’aventure hors des sentiers battus. De nombreuses initiatives individuelles semblent vouloir montrer le chemin. Si ces conditions sont respectées, le Langtang pourrait bien dans les années à venir voir son développement croitre très rapidement et pourquoi-pas concurrencer ses grands frères des Annapurnas et de l’Everest.
Enfin, la TAAN (Trekking Agencies’ Association of Nepal) est un réseau regroupant 1 200 agences Népalaises sur les 2000 existantes au Népal. Nous estimons qu’il est aussi de son devoir de prendre des mesures pour à la fois renseigner ses membres des conditions de trek dans le Langtang. Huit mois après le séisme, aucune note n’a été communiquée aux membres pour rendre compte de la situation précise des lieux. La plupart des agences Népalaises sont en effet en grande difficulté pour organiser, même aujourd’hui, un trek dans ce Parc National, faute d’informations précises et objectives. Compte tenu de l’état actuel de la région et de ses habitants, la TAAN doit aussi apporter un regard et une ligne directrice précisant quelle approche les agences de trek doivent avoir face à cette vallée qui est aujourd’hui meurtrie, par respect pour tous ces hommes et femmes en situation catastrophique. Et enfin, ce serait à notre avis une bonne façon de relancer l’économie locale, l’Etat, en collaboration avec la TAAN et le Ministère du Tourisme, devrait accorder des subventions favorisant l’organisation de treks dans la région, mais aussi l’emploi de porteurs et guides de la vallée et surtout rendre temporairement le permis d’entrée dans le Parc National gratuit au lieux de lui faire subir une hausse en TVA de 13 % alors que ces permis sont délivrés uniquement par l’Etat et que le Langtang est le seul Parc National du Népal à avoir ajouté une TVA au prix de son permis qui est passé de 3000 Rs à 3390 Rs depuis le tremblement de terre.
L’AVENIR DE LA REGION :
La situation n’a guère évolué au niveau des projets de relogement des réfugiés de la vallée.
Pour mieux comprendre la complexité de gestion des projets, nous allons prendre en compte les deux différentes zones de la vallée qui n’ont pas le même mode opératoire :
1 – La zone se trouvant entre Sherpagaon et Thyangsyap qui est intégralement en terrain public (du Parc National) et dont 100 % des maisons sont dédiées au tourisme (guest-houses, tea-houses, bureaux du Parc, Army check post, …).
2 – Le reste de la vallée est plutôt constitué de villages (Langtang, Mundu, …), essentiellement en terrains privés.
Ces deux zones ont leurs contraintes propres et surtout elles ne bénéficient pas des mêmes règles de réhabilitation.
Comme nous l’avons évoqué précédemment, tout ce qui se trouve sur les terres du Parc National sera reconstruit ou est déjà en train de l’être. Des établissements supplémentaires pourraient même voir le jour, notamment à Ghoratabela. Ces derniers établissements seront aux frais du Parc, tandis que toutes les guest-houses à reconstruire seront financées par les gérants (locataires) des établissements concernés.
Dans la deuxième zone, celle du haut de la vallée, le problème majeur est à Langtang où quasiment les 2/3 du village ne sont pas reconstructibles.
Langtang était un village étalé, vaste et qui est aujourd’hui recouvert d’un amas de roche aux 2/3 de sa surface. Reconstruire sur le pierrier est impossible et le Parc a annoncé qu’aucun terrain public ne sera mis à la disposition des réfugiés.
La partie haute (est) de Langtang semble pouvoir être reconstruite, c’est d’ailleurs un des défis de Om Nepal. Une petite partie du village pourrait donc se reconstruire à cet endroit, l’autre partie sera fatalement encore plus en amont de la vallée.
Quoi qu’il en soit, il faudra donc que la reconstruction se fasse impérativement en terrains privés. En parcourant le sentier après Langtang (aux alentours de Mundu), on se rend vite compte qu’il y a de nombreux terrains sûrs et favorables à la reconstruction, mais ils sont presque tous privés. Plusieurs Langtangpas originaires de la région ont du terrain dans cette zone pour d’habitude faire pâturer les yacks. Nous imaginons que beaucoup de maisons se reconstruiront à cet endroit. Il s’agira donc pour ces habitants de se délocaliser vers cette zone plus sûre.
Le gros problème est donc pour ceux qui habitaient dans la zone ensevelie et qui n’ont pas de terres dans la haute vallée. Ceux-ci se retrouvent aujourd’hui avec un terrain à Langtang n’ayant plus aucune valeur, n’étant plus constructible et sans opportunité de reconstruire leurs maisons dans la vallée. La reconstruction de Langtang dépendra alors de la mise à disposition de certains terrains (privés comme publics) pour ces habitants sans aucune solution de repli mais rien n’est encore bien défini selon nos informations.
Les habitants de Thyangsyap, Mundu, Shindum et Kyanjin Gompa sont dans une situation plus favorable car leurs terrains sont moins exposés aux risques naturels. La reconstruction, hormis les contraintes budgétaires, devrait avoir lieu sans trop de problème.
De nombreuses personnes bénéficient ou ont bénéficié de formations financées par l’Etat et/ou par des ONG afin que ceux qui ne vivaient pas du tourisme auparavant puissent en profiter, notamment grâce à la gestion de guest-houses, au métier de porteur ou guide ou autres services aux trekkeurs. Ces formations, même si elles sont bénéfiques pour ces gens, sont à notre avis aujourd’hui hors sujet tant il y a de choses à régler bien avant de penser à développer le tourisme dans la région.
Car comment ces gens, même formés, peuvent-ils vivre du tourisme si aucun effort réel n’est fait de la part de l’Etat et du Parc pour faire à la fois revenir les touristes et aménager le secteur de façon probante, encadrée et subventionnée ? Les personnes de la vallée seront-elles privilégiées pour gérer les guest-houses du Parc (ce qui n’est pas forcément le cas aujourd’hui) ?
Toutes ces mesures nous laissent perplexes lorsqu’on constate l’absence de communication, de prises de décisions et de respect des promesses faites par l’Etat. Rappelons qu’environ 2000 $ avaient été promis par l’Etat pour chaque maison totalement détruite par le tremblement de terre. Cet argent avait été perçu par l’aide internationale et toutes les ONG Népalaises, puis donné à la fondation du Premier Ministre de l’époque, Monsieur Koirala, décision qui avait été prise par le Gouvernement pour « permettre une meilleure répartition des aides ». A ce jour, selon le secteur, c’est seulement 22 000 Roupies (soit 210 $) qui ont été distribuées huit mois après les évènements.
NOTRE REGARD SUR LE TOURISME :
Lors de notre présence durant ces six jours, nous avons rencontré dix trekkeurs, ce qui est cinq fois moins qu’auparavant. Il faudra certainement plusieurs années pour retrouver une fréquentation convenable, même si d’ici un an la plupart des établissements seront déjà réhabilités. La cicatrice n’est pas près de s’effacer à certains endroits (Ghoratabela, Langtang, Bamboo), venir faire du tourisme dans la région peut donc vite tourner au tourisme que nous appelons morbide ou voyeuriste. Le tourisme doit donc être pratiqué de manière responsable, raisonnable et participative s’il doit revenir dans la vallée. Ce que nous entendons par ces trois termes, c’est de favoriser le développement économique local en privilégiant des treks en guest-houses ou chez l’habitant et en s’encadrant d’une équipe Tamang (native de la région), respecter les populations locales, leur culture, leur reconstruction (mentale comme matérielle), se respecter soi-même en restant sur ses gardes (les nombreux pierriers à traverser sont exposés à d’autres éboulements) et enfin, avoir un regard solidaire de votre trek ; cela peut passer par un don à une ONG locale ou plus simplement passer par une agence qui s’investit dans la région. Le tourisme qui doit renaître dans la région doit être altruiste, raisonné et solidaire. Aller faire un trek personnel, individuel ou en autonomie n’est pas, à notre sens, à souhaiter pour les saisons à venir.
Notre conseil : passer par une agence spécialiste de la région.
Nous conseillons en effet vivement de passer par une agence locale pour réaliser ce trek. L’agence choisie doit être de confiance (éthique et responsabilité) et si possible spécialiste ou même originaire de la région. Passer par de telles agences garantit aux trekkeurs sécurité et informations précises sur la région et sensibilisation des touristes au respect de la culture locale et de l’Homme en général et une répartition équitable des recettes financières en n’employant que des équipes natives de la région. Certaines de ces agences financent même des micro-projets d’aide.
Quel avenir pour ce trek ?
Compte tenu de la notoriété du trek du Langtang et de tous les médis qui parlent ou ont parlé de ce qui s’y est passé, nous ne voyons pas pourquoi le tourisme ne reprendrait pas ses droits dans cette zone. Présenté jusqu’à aujourd’hui comme une vallée anéantie, le Langtang fait aujourd’hui peur. Il faudra sûrement beaucoup de temps pour que le bouche-à-oreille se fasse et qu’une communication soit faite pour que le tourisme revienne, mais il reviendra à coup sûr et de manière encore plus importante qu’avant le séisme. C’est pour cette raison que dès aujourd’hui des décisions doivent être prises pour que ce tourisme soit de qualité, qu’il ait une réelle influence positive sur la région et que les structures d’accueil soient refaites dans le respect de l’environnement, de la culture locale et suffisamment résistantes.
ITINERAIRE A SUIVRE :
A titre indicatif, voici ce que peut être le trek du Langtang si vous souhaitez le réaliser aujourd’hui :
(Village de départ – pause déjeuner – village d’arrivée)
1 – Syabru Besi – Sherpagaon - Rimche (6h de marche – nuit en guest-house)
2 – Rimche – Ghoratabela - Mundu (7h de marche – prévoir un pack lunch – nuit chez l’habitant)
3 – Mundu – Kyanjin Gompa (1h30 de marche – nuit en guest-house)
4 – Kyanjin Gompa – Chunama – Sherpagaon (7h de marche – prévoir un pack lunch – nuit en guest-house)
5 – Sherpagaon – Bhanjyangaon – Syabru Besi (4h30 de marche)
Des itinéraires alternatifs sont possibles comme passer côté Helambu via le Ganja La Pass (5130m – direction sud de Kyanjin Gompa - trek sportif sous tente) ou continuer à remonter la vallée jusqu’à Lankshisha Kharka et virer sud-est via le Tilman’s Pass (5320m – trek très sportif). Ces deux autres alternatives pourraient bien connaître un développement sans précédent dans les années à venir avec, à la fois, la mouvance générale des trekkeurs à vouloir réaliser des treks hors des sentiers battus, mais aussi la volonté des agences spécialistes de la région à vouloir proposer des circuits différents pour éviter de ne faire qu’un aller-retour dans cette vallée.
UN CONTEXTE POLITICO-ECONOMIQUE DIFFICILE
Nous l’avons dit, le Népal connait depuis le 20 septembre 2015 une des plus terribles crises politique et économique de son histoire. A cette même date avait pourtant été annoncé fièrement par Monsieur le Premier Ministre Koirala l’établissement de la toute première constitution de l’histoire du pays. En 2008, deux ans après la chute du régime monarchique de 2006, le pays adoptait le régime républicain démocratique de type fédéral. S’en est suivi une succession anarchique de gouvernements, alternant Maoïstes (United Communist Party of Nepal), Communistes (Nepali Congress) et Socio-communistes (Unified Marxist Leninists). Avant la création de la constitution, le Gouvernement élu était de mouvance Nepali Congress. Une fois cette constitution officiellement créée, Monsieur Oli du parti UML a été élu par le Parlement pour être Premier Ministre. Bien entendu, cette annonce de constitution a été perçue comme un évènement historique, une fête nationale synonyme d’un nouveau Népal, un Népal qui se reconstruit, un Népal qui s’organise. Mais seulement quelques jours après cette fête, le peuple Népalais déchantait vite en voyant à la une des journaux que l’Inde fermait ses frontières.
Mais qu’a t’il bien pu se passer pour en venir là dans une période si faste ?
La réponse se trouve au sud du Népal, le long de la frontière Indienne, dans la région du Teraï.
Au lendemain de l’annonce de la nouvelle constitution, le petit groupe politique (jamais élu) du Teraï, appelé Madhesi, manifestait son mécontentement concernant la fédéralisation du Népal et plusieurs amendements remettant en cause quelques droits civiques et sociaux. Le pays étant un état fédéral choisi à l’unanimité, il était prévu dans la constitution qu’il soit divisé en six états, ce qui sur le papier convenait à à-peu-près tout le monde. Jusque-là rien d’original. Sauf qu’il faut savoir que le Népal, c’est 60 ethnies et autant de cultures et langues distinctes. Là où le groupe Madhesi n’est pas satisfait, c’est que dans chacun des états incluant des régions du Teraï les ethnies Indo-Népalaises se retrouvent systématiquement en nombre minoritaire par rapports aux nombreuses autres ethnies de l’Etat. En soit, cette remarque peut être judicieuse et même vue comme discriminatoire, mais le fait est que tout le Népal connait ce phénomène de par son histoire, sa culture et sa démographie. Certes la plupart des ethnies Népalaises ont une région d’origine (les Sherpa vers l’Everest, les Tamang dans le Langtang, les Newars en vallée de Kathmandu, les Gurung dans la région des Annapurna, …) mais rappelons que ces régions sont de petite taille à l’échelle d’un Etat et qu’elles ont elles aussi été intégrées à des Etats dont l’ethnie majoritaire n’est pas forcément la leur. Le peuple Népalais vit en harmonie depuis des siècles, en parfaite mixité culturelle et religieuse, c’est même ce qui fait sa force et son originalité. Commencer aujourd’hui à établir des Etats ethniques ou de couleur politique causerait la perte totale des commandes du pays et de sa culture si riche et pourrait conduire à des dérives dangereuses pour la stabilité politique du pays. Le Gouvernement en est bien conscient. De plus, géographiquement, il n’est techniquement pas possible de constituer un Etat du Teraî tant sa surface est complexe et allongée (environ 860 km x 30 km).
Le groupe Madhesi, sur cette base ethnique et politique, a donc décidé de bloquer tous les échanges commerciaux entre Inde et Népal jusqu’à exécution de ses revendications, c'est à dire la création d'un Etat du Teraï.
Compte tenu de la quasi-inexistence de frontière migratoire entre Népal et Inde, la grande majorité de la population du Teraï se retrouve aujourd’hui avec la double nationalité, ce qui fait du Teraï une zone tampon entre Népal et Inde très difficile à gérer.
De façon globale, cette population n’est pas spécialement d’accord avec les idées du groupe Madhesi, mais cette entité politique étant très structurée, active, soudée et financée, son influence s’étend maintenant à tout le pays.
Depuis trois mois, le Népal se retrouve donc avec une frontière Indienne fermée à 90 % sur les cinq principales voies de communication, privant le pays de ses plus précieuses matières premières d’importation : le pétrole et le gaz. A cause de ce phénomène, la totalité des biens importés d’Inde a vu ses prix doubler, voire tripler et le pays s’est retrouvé complètement paralysé dès la deuxième semaine de blocage. L’huile alimentaire, le sucre, le ciment, les produits obtenus à partir du pétrole ont par exemple vu leur prix s’enflammer, … lorsqu’on en trouve…
Pour vous donner un ordre d’idée, l’attente à la pompe est de, en moyenne, cinq jours pour obtenir quelques petits litres d’essence ou diesel rationnés (en général 4 litres d’essence par moto, 10 litres pour un taxi, 15 litres pour les véhicules diesel), quand les pompes sont approvisionnées. Depuis ces trois mois, du gaz a été distribué uniquement à deux reprises et pour une toute petite minorité de gens. La population de Kathmandu se retrouve dans des conditions de vie plus que précaires, sans gaz pour cuisiner. Face à cette pénurie, les gens ont décidé de s’équiper en matériel électrique (plaque à induction, chauffage électrique…), il en résulte aujourd’hui une surconsommation entraînant des black-out. En période normale, Kathmandu connait des coupures de courant avoisinant les 8 à 10 heures par jour au mois de novembre. Aujourd’hui, les coupures sont de l’ordre de 12 à 16 heures par jour en raison de cette surconsommation et lorsqu’il y a de l’électricité ce n’est qu’à puissance divisée par deux, insuffisante pour utiliser un cuiseur électrique.
Bien entendu, des petits malins ont créé un marché noir, aujourd'hui très bien organisé et développé dans tout le pays. Ce marché parallèle est devenu l'unique fournisseur d'essence et de gaz du pays, les stations et dépôts n'étant plus approvisionnés. Tellement bien organisé et financé, ce marché noir permet en un claquement de doigt d’obtenir de l’essence (diluée) à 3 € le litre ou une recharge de gaz à 80 € venant d'Inde, alors que deux mois auparavant les tarifs avoisinaient plutôt les 8 € le litre d’essence et 110 € la recharge de gaz.
Dans ces conditions, comment le Népal peut-il se reconstruire avec un sac de ciments au prix doublé, un coût de transport parfois triplé, un marché noir profitant de la misère des gens et un Gouvernement semblant ne rien faire pour que la situation s’améliore ?
Six mois après la catastrophe qu’a connue le pays, ce peuple n’avait vraiment pas besoin de ça alors qu’il commençait tout juste à se reconstruire. N’oublions pas que nous sommes au début de l’hiver, que les coupures d’électricité vont s’intensifier et que le froid va s’installer dans le pays.
Compte tenu du peu d’éléments ressortant des nombreux meetings réalisés et de la quasi absence d'informations réelles communiquées par les médias, il est peu probable que la situation s’améliore avant plusieurs mois. Les foules sont au bord de l’explosion. La situation nous inquiète au plus haut point tant on ignore à quoi peut aboutir cette paralysie qui met à bout tous les Népalais.
UNE REGION EN PLEINE MUTATION
Avec la crise politique et énergétique du Népal, le pays doit faire face à une pénurie de matières premières sans précédent. Ces matières premières sont le moteur du pays, le moteur de l’économie, le chauffage de tous les foyers et pire encore la flamme pour cuisiner. Avec cette situation, l’Etat et son peuple doivent trouver d’autres alternatives, d’autres façons de consommer, de vivre, voire de survivre pour certains.
L’Inde étant le fournisseur ultra-majoritaire de toutes ces denrées, le Népal commence timidement (il ne faut pas froisser l’Inde !) à se tourner vers la Chine pour tenter de développer des échanges commerciaux alternatifs, notamment pour les carburants. Depuis quelques années, une piste reliant Syabru Besi à la ville Tibétaine de Kerong (à 45 km au nord de Syabru Besi et Rasuwagadhi) a été construite et la frontière a totalement ouvert le 15 octobre aux échanges commerciaux. Une date avancée considérablement par rapport à la date prévue pour montrer au Népal que la Chine est ouverte à apporter son aide et à ouvrir un marché avec son voisin. Cette ouverture n’a finalement eu aucun impact dans la crise politique actuelle du Népal qui est bloqué par des accords et contrats commerciaux avec l’Inde. Pour autant, la frontière Rasuwagadhi – Kerong sera à coup sûr très rapidement une des plaques tournantes commerciales du Népal qui renégociera tous ses contrats d’importations une fois la crise du Teraï terminée.
La Chine se dit prête à ouvrir un marché avec le Népal et investit en masse dans la construction de routes coté Népalais. La route actuelle reliant Trishuli à Dhunche et Syabru Besi sera dans le futur proche ignorée au profit d’une route plus sûre, plus large, plus directe et moins exposée aux éboulements. Cette nouvelle route rapprochera Kathmandu de Syabru Besi de façon considérable puisqu’il ne faudra, selon les rumeurs, que 4h30 au lieu de 6h à 7h pour faire ce trajet.
Ce changement est une très bonne nouvelle pour le Népal qui pourra bénéficier d’une nouvelle alternative commerciale et n’aura plus jamais à faire face à un embargo comme il le subit aujourd’hui et l’hydroélectricité développée dans le district de Rasuwa pourrait à terme réduire de façon significative les coupures d’électricité en vallée de Kathmandu.
Cependant, au niveau du tourisme dans la région, quelles conséquences cette évolution pourrait-elle avoir ? La région pourra t’elle s’adapter à un tel développement économique ?
Notre réponse est nuancée. Certes, une route directe et en bon état sera un atout majeur pour la région qui pourrait voir son flux de touristes augmenter. Mais cette route pourrait aussi détourner les touristes vers d’autres points de départ de trek. Nous pensons notamment à Dhunche qui ne sera plus sur la route principale d’accès à la région et Syabru Besi qui pourrait ne devenir qu’une ville étape de routiers bruyante et foisonnante.
Les temps de transports étant réduits par l’apport d’une route en bon état, les touristes pourraient peut-être ne voir aucun intérêt à séjourner dans ces villages, mais plutôt à monter plus haut dans la vallée et trouver des conditions d’accueil plus typiques, plus calmes et moins bondées.
Si la situation évolue comme nous le pensons, Gatlang, étant déjà raccordé à la route, deviendrait le point de départ du Tamang Heritage Trail, du Paldor Trek et (éventuellement) un point final du trek du Ganesh Himal. Thulo Syabru, une fois sa piste ouverte, pourrait devenir le point de départ des treks du Langtang (si le sentier Thulo Syabru - Rimche est réhabilité) et de Gosaikunda et Dhunche deviendrait une ville désertée de touristes, ou presque.
Quelque part, ce phénomène serait finalement bénéfique pour la région qui verrait le flux de touristes se répartir en plusieurs zones et ferait profiter plus de personnes des recettes économiques. Jusqu’à aujourd’hui, Syabru Besi neutralisait tous les autres points de départ de treks et centralisait tous les trekkeurs en partance pour le Tamang Heritage Trail, le trek de Gosaikunda et le trek du Langtang.
Aujourd’hui la situation a changé en raison du tremblement de terre et Dhunche accueille presque autant de touristes que Syabru Besi. Mais une fois la route longeant la Trishuli Ganga Nadi terminée, Dhunche pourrait être laissée pour compte, son déclin avait d’ailleurs commencé à s’amorcer depuis plusieurs années avec l’arrivée de la route à Syabru Besi.
Un plan détaillé vous précise ci-dessous tous les projets en cours ou les routes déjà construites ne figurant toujours pas sur les cartes de l'Etat et des boutiques spécialisées.
LE POINT SUR NOS PROJETS D’AIDE
A ce jour, Nepatrek Solidarité France est fière d’annoncer que sa collecte de fonds lancée du 29 avril 2015 à aujourd’hui s’est bouclée avec un budget de 12 000 € grâce à ses nombreux généreux donateurs. Privés comme professionnels (Banque Française Mutualiste, Crédit Agricole, Sylva Spare Plus et Decathlon Nevers qui a contribué à sa manière en donnant une cinquantaine d’habits techniques contre le froid et la pluie) ont fait preuve d’une belle générosité que nous saluons.
A tous ceux qui ont participé, les mots manquent pour vous dire à quel point nous vous sommes reconnaissants. Grâce à vous tous, c’est près de 800 personnes que nous pouvons aider, à Thulo Syabru et Syabru Besi.
A ce jour, nous sommes quelques peu déçus de n’avoir pu utiliser que 8000 € sur notre budget.
La crise actuelle du Népal nous a obligés à geler le reste de notre budget tant l’inflation et le marché noir gangrènent l’économie et le marché de l’alimentaire.
Au jour d’aujourd’hui, nos plans d’aide ont été organisés de la façon suivante :
1 - Un total de 1 000 € a été donné à deux guides Sherpa (de l’Everest) pour aider leurs familles à reconstruire leurs maisons. Ces 1 000 € ont été donnés par deux différents donateurs individuels désireux d’aider précisément ces deux guides avec lesquels ils entretiennent de bonnes relations depuis plusieurs années. L’association n’a dans ce cas été qu’un relais entre les deux donateurs et leurs amis Népalais.
2 - Un total de 5 500 € a été distribué en apport de matériel (ciment, transport, briques, boiserie, ferraille,…) pour aider à la reconstruction de cinq maisons (deux à Syabru Besi et trois à Thulo Syabru). Trois maisons sont presque terminées et ont été reconstruites dans le respect de la culture locale, en pierre sèche et bois. Elles ont été conçues pour être légères et résistantes, sans pour autant devoir acheminer un seul sac de ciment. Les deux autres sont dans un autre cas de figure, très endommagées, mais réparables. Pour les consolider, il a donc fallu apporter ciment et ferraille pour faire des piliers de renfort et refaire ce qui a été détruit. Les travaux de ces deux maisons sont en cours et pourraient se terminer dans quatre mois.
3 - 1 500 € ont été donnés au chantier lancé par le maire du village de Thulo Syabru et représentant du WWF du Parc National, Pema Dorjee Tamang, pour construire une piste reliant Sano Barkhu – Brabal – Thulo Syabru. Sans cette piste, la quasi-totalité du village est dans l’incapacité de reconstruire son logement du fait de son éloignement de la route. Ces 1 500 € ont servi et serviront à financer (en partenariat avec d’autres ONG) les salaires des ouvriers travaillant sur le chantier. Il est estimé qu’il faut environ deux mois de travail intensif pour arriver au bout du chantier. Ce dernier est pour l’instant stoppé en raison de la quasi-absence et du coût du carburant pour alimenter les pelleteuses faisant le gros du travail. Il devrait reprendre d’ici un mois si le projet arrive à trouver de l’essence.
Le reste du budget (4 000 €) était dédié à une aide alimentaire composée de 10 litres d’huile, 10 Kg de sucre, 1 Kg de thé, 2 savons pour le corps, 2 savons de lessive, 1 tube de dentifrice et 500 Gr de lait en poudre destinés aux 800 habitants du village représentant 160 maisons. Nous sommes dégoutés de devoir geler ce projet pour une durée indéterminée car la situation actuelle du pays ne nous permet pas de mener à bien cette aide.
Pour vous donner plus d’éléments :
Voici un comparatif du tarif normal et du tarif d’aujourd’hui pour l’huile alimentaire et la location d’un camion (les autres produits ayant augmenté mais de façon tolérable) :
- 1 600 Litres d’huile coûtent normalement 1 745 € / Aujourd’hui : 3 640 €
- La location d’un camion Kathmandu – Syabru Besi coûte normalement 320 € / Aujourd’hui : 600 €
Ce qui représente pour ces deux seuls exemples, une hausse du budget de 2175 €. Intolérable et insurmontable pour notre structure qui a des valeurs équitables, responsables et éthiques, quand on sait que cette inflation n’est due qu’au marché noir.
Baisser la quantité de produits destinés à être distribués pour respecter notre budget initial est tout simplement impensable. Ce serait priver 800 personnes d’une aide prévue, planifiée et officialisée, au profit de quelques malhonnêtes gens qui profitent du système et de la misère de certains. Il est bien écrit dans nos statuts que nous sommes apolitiques, areligieux et équitables, jamais nous ne financerons le marché clandestin et la corruption.
C’est donc, à regret certes, mais aussi avec beaucoup de fierté de ne pas céder à cette organisation mafieuse, que nous reportons notre aide alimentaire. Elle est donc pour l’instant prévue dans les mêmes conditions avant le nouvel an Tibétain (prévu le 9 mars 2016). Si à cette date la situation politique est toujours la même, alors nous réunirons notre bureau pour une Assemblée Générale Exceptionnelle afin de définir quelle autre aide communautaire nous pourrons apporter au village avec le même budget de 4 000 €.
Tous les projets évoqués seront prochainement illustrés de photos que nous enverrons à tous les donateurs afin qu’ils puissent constater l’aide apportée et surtout les gens qu’ils ont aidés en nous soutenant. C’est très important pour nous qui sommes une structure familiale, de proximité, de pouvoir entretenir le lien que nous avons créé avec tous nos donateurs.
INFORMATION, SENSIBILISATION ET PARTAGE :
Ce rapport est la propriété de l’association Nepatrek Solidarité mais reste disponible et consultable par tout utilisateur, qu’il représente une entreprise, organisation à but non lucratif ou à titre privé, s’il en fait expressément la demande.
Notre but est qu’il soit justement consulté le plus largement possible afin de donner un regard objectif sur la région et surtout que le Langtang ne soit plus connu comme une région anéantie et meurtrie mais comme une région de trek majeure qui saura se relever comme le reste du pays et vous accueillir d’une façon dont seuls les Tamang sont capables de le faire.
Chers amis trekkeurs, professionnels du trekking, médias divers, associations, ce rapport a été réalisé pour vous permettre de prendre connaissance de la situation réelle de la région pour vous permettre d’en tenir compte dans vos projets et organisations de voyages au Népal.
La région du Langtang et le Népal en général souffrent d’un manque flagrant d’informations objectives et vraies depuis le tremblement de terre. Trop souvent, on nous a présenté le Népal comme étant totalement détruit, avec un Kathmandu dépassé par les évènements et le reste du pays complètement rasé.
Sachez qu’aujourd’hui plus de 95 % des treks ont rouvert et que TOUT le pays est en mesure d’accueillir les touristes dans les mêmes conditions qu’avant le tremblement de terre et que tous ces magnifiques endroits qui font la culture du pays, sa beauté, sa fierté existent encore !
C’est pour cela que nous vous prions de diffuser ce rapport le plus largement possible. Certes, la région du Langtang a beaucoup souffert et, par endroit, tout est à reconstruire. Mais la région existe encore et demeure toujours aussi belle. Une sensibilisation au plus grand nombre contribuera aussi à faire revenir le tourisme dans la région et à contrer toutes les idées reçues diffusées par nos médias télévisés et presse journalistique qui n’ont quasiment jamais mis les pieds au Népal et qui même ignorent les problèmes politiques qui ont lieu en ce moment.
Merci à tous…